Des artistes de premier plan comme les musiciens Yehudi Menuhin, Mstislav Rostropovitch,
Carlo Maria Giulini, Daniel Barenboim, Riccardo Muti,
Myung-whun Chung, Adolf Busch, les compositeurs Béla Bartók,
Dmitri Chostakovitch, Benjamin Britten, Olivier Messiaen,
le peintre Vincent van Gogh, les écrivains Albert Camus, Vercors (Jean Bruller),
Roger Grenier, Václav Havel et beaucoup d'autres que je ne peux citer ont placé la fraternité, la paix
et l'art au-dessus de tout - et d'eux-mêmes.
D'autres personnes, d'horizons divers, se sont aussi mobilisées pour des causes humanitaires et la paix : des artistes populaires - comme Midnight Oil,
Johnny Clegg, Roger Waters, Peter Gabriel et d'autres -,
des athlètes - comme le cycliste Gino Bartali -, et même quelques leaders politiques comme Nelson Mandela.
Le violoniste et chef d'orchestre Yehudi Menuhin (22 avril 1916, New York - 12 mars 1999, Berlin), un des plus grands violonistes du xxe siècle, élève de Georges Enesco et Adolf Busch entre autres, a joué pour les troupes alliées pendant la 2e guerre mondiale, et pour les survivants de plusieurs camps de concentration en 1945 avec Benjamin Britten au piano. Il revint rapidement jouer en Allemagne avec le Philharmonique de Berlin dirigé par Wilhelm Furtwängler, comme acte de réconciliation.
Il a aussi soutenu Béla Bartók, Mstislav Rostropovitch et Miguel Ángel Estrella pour
n'en citer que quelques uns. Il a été particulièrement reconnu pour ses interprétations de la musique de Johann Sebastian Bach, Béla Bartók, Ludwig van
Beethoven, Johannes Brahms, Wolfgang Amadeus Mozart...
Il a établi une école à Stoke d'Abernon, Angleterre, une association caritative au Royaume-Uni, une fondation à Paris, etc., pour aider les jeunes
musiciens et permettre à des professionnels de porter la musique dans la population.
Il a critiqué le régime soviétique et l'attitude d'Israël envers les Palestiniens à plusieurs reprises, souhaitant que les deux peuples vivent en paix,
et a joué pour les réfugiés palestiniens. Il a reçu le Nehru Peace Prize en 1960 et été ambassadeur de bonne volonté de l'UNESCO dans les années 1990
et également présidé son Conseil International de la Musique.
Le violoncelliste et chef d'orchestre Mstislav Rostropovitch (27 mars 1927, Bakou - 27 avril 2007, Moscou), un des plus grands violoncellistes du xxe siècle, également très bon pianiste, a lutté pour la liberté d'expression et la liberté culturelle en URSS : il quitta le Conservatoire de Moscou pour protester contre le renvoi de Dmitri Chostakovitch en 1948, et abrita dans sa maison Alexandre Soljenitsyne en 1970. Il a été finalement contraint à l'exil et déchu de sa citoyenneté soviétique.
On retrouve parmi ses plus remarquables interprétations des œuvres de Johann Sebastian Bach, Ludwig van Beethoven, Johannes Brahms et de ses
contemporains Benjamin Britten, Dmitri Chostakovitch, Henri Dutilleux, Witold
Lutoslawski et Alfred Schnittke.
Il a participé aux efforts de l'Armenian Relief Society après le tremblement de terre de 1988. L'année suivante, "Slava" a joué de façon improvisée
les Suites pour violoncelle de Bach devant le Mur de Berlin lors de sa chute. Les images firent le tour du monde à la télévision. Il a été réhabilité
par Mikhaïl Gorbatchev, sa citoyenneté restaurée en 1990. Il a été à Moscou soutenir la démocratie lors du putsch
avorté de 1991. Il a été ambassadeur de bonne volonté de l'UNESCO à partir de 1998, et a créé plusieurs fondations d'aide aux enfants de l'ex-URSS.
Le grand chef d'orchestre Carlo Maria Giulini (9 mai 1914, Barletta - 14 juin 2005, Brescia) a débuté altiste dans l'un des meilleurs orchestres italiens à Rome et joué sous les plus importants chefs de l'époque. Sa référence était Bruno Walter, qui donnait à chaque musicien le sentiment d'être important, une qualité qu'il a lui-même possédé. Il allait commencer à diriger quand la 2e guerre éclata, et il fut envoyé en Croatie. Pacifiste, il était fortement anti-fasciste et a refusé de tirer sur un autre homme. Il s'est marié avec son amour Marcella pendant une permission, puis quand les Nazis ont pris le contrôle de l'Italie et que les soldats ont reçu l'ordre de se battre à leurs côtés il s'est caché près d'un an, avec des amis et une famille juive.
Après la guerre, il a dirigé l'orchestre pour la première fois et sa réputation a grandi rapidement en Italie, puis dans le reste du monde. Il a privilégié
d'abord l'opéra (devenant le chef principal à la Scala), et plus tard la musique orchestrale, car les conditions pour l'opéra ne lui permettaient plus
de servir la musique du mieux possible.
Ses interprétations de Bach, Haydn, Mozart, Beethoven. Schubert, Brahms, Bruckner, Mahler, Debussy, Ravel ou Verdi restent uniques pour leur élévation
spirituelle et leur force expressive, tension interne et élégance. Il a joué peu de musique de la seconde moitié du XXe siècle - à l'exception notable
du War Requiem de Britten, cher à son cœur - surtout parce qu'il lui fallait beaucoup de temps avant de se sentir
prêt à jouer la musique. Il était adoré des musiciens (et du public) pour son immense respect et amour de la musique et des personnes qui la jouent.
Le pianiste et chef d'orchestre Daniel Barenboim (né le 15 novembre 1942 à Buenos Aires) a été comme Yehudi Menuhin un enfant prodige. Il a noué des amitiés avec de nombreux musiciens de premier plan, dans les différents pays où il s'est produit et est polyglotte. En 1989, il dirige le Philharmonique de Berlin juste après la chute du Mur, dans un concert gratuit réservé aux habitants de Berlin-Est. Il a publiquement critiqué à plusieurs reprises l'attitude d'Israël envers les Palestiniens et exprimé son souhait de voir coexister deux pays de manière pacifique. Il a créé un orchestre avec des musiciens israéliens, palestiniens, de pays arabes et européens - le West-Eastern Divan - avec Edward Said, intellectuel palestinien en 1999.
Il a été le premier à diriger le Philharmonique de Berlin en Israël en 1990 et aussi le premier à jouer du Wagner en Israël en 2001, en second bis et après
un long échange avec le public. Il a également dirigé du Wagner avec l'Israel Philharmonic et le West-Eastern Divan. Dirigeant régulièrement en Israël, il a
organisé des concerts dans les Territoires Palestiniens, dont un concert en 2011 avec l'aide de l'ONU et de membres de grands orchestres européens.
Il a créé des fondations - parfois avec Edward Said - et une académie dans plusieurs pays, pour aider les jeunes musiciens par le biais d'écoles, de bourses
d'étude ou d'autres actions. Il possède plusieurs nationalités, dont fait unique, l'israélienne et la palestinienne.
Barenboim a une relation particulière avec la musique de Johann Sebastian Bach, Béla Bartók, Ludwig van Beethoven, Johannes
Brahms, Anton Bruckner, Frédéric Chopin, Claude Debussy, Wolfgang Amadeus Mozart, Franz Schubert...
Le chef Riccardo Muti (né le 28 juillet 1941 à Napoli) a dirigé les plus grands orchestres depuis plus de 50 ans. Au cours des dernières décennies, il s'est à plusieurs reprises insurgé contre les coupes budgétaires dans le domaine de la culture, comme en 2011 lors des célébrations liées aux 150 ans de l'unité italienne. Il a fondé un orchestre de jeunes ainsi qu'une académie à Ravenna centrée sur le chant et la direction d'orchestre.
Riccardo Muti a un amour particulier pour des compositeurs comme Beethoven, Haydn, Mozart, Schubert, Schumann, Tchaïkovski et les compositeurs
italiens d'opéra, mais il dirige aussi des compositeurs et des œuvres moins connus.
A partir du milieu des années 1990, il s'est associé au projet "Le Vie dell'Amicizia" dans le cadre du festival de Ravenne, dirigeant des concerts dans des lieux
dont l'histoire récente a été tragique, comme Sarajevo, Beyrouth, Jérusalem, Moscou, Erevan, Istanbul, New York, Le Caire, Damas, Nairobi, Tokyo, Téhéran, Kiev...
Le chef d'orchestre et pianiste Myung-whun Chung (né le 22 janvier 1953 à Séoul) a été assistant de Carlo Maria Giulini qu'il admirait avant de devenir Directeur musical d'orchestres européens tout en étant invité un peu partout dans le monde. Il a développé un lien fort avec Olivier Messiaen avec lequel il a collaboré et dont il a créé la dernière œuvre.
Myung-whun Chung s'est concentré principalement sur des compositeurs des XIXe et XXe siècles, dont Gustav Mahler, Hector Berlioz, Dmitri Chostakovitch
Messiaen bien sûr, Henri Dutilleux et des opéras de la même période.
Il a toujours consacré une part importante de sa vie à des causes humanitaires et écologiques. Il a créé une série de projets musicaux et environnementaux en Corée
pour les jeunes et été Ambassadeur aux Nations Unies pour le Programme de Lutte contre la Drogue. Il a aussi participé à des actions de la Croix Rouge sud-coréenne
et de l'UNESCO. Depuis 2008, il est ambassadeur de bonne volonté de l'UNICEF.
Le violoniste et chef Adolf Busch (8 août 1891, Siegen - 9 juin 1952, Guilford, Vermont) a dédié sa vie à la musique. Il était un grand soliste, un remarquable interprète de musique de chambre, le primarius de l'admirable Quatuor Busch et le leader de petits ensembles. Parmi ses partenaires et élèves on note rien moins que Rudolf Serkin et Yehudi Menuhin. Lui et ses frères Hermann et Fritz étaient parmi les plus grands musiciens allemands de l'époque.
Busch a laissé des enregistrements extraordinaires de Johann Sebastian Bach, Ludwig van Beethoven, Johannes Brahms, Wolfgang Amadeus Mozart, Franz
Schubert, Robert Schumann...
Homme intègre d'une nature noble, il a été un anti-nazi convaincu, et a choisi l'exil dès 1933. Lui et les siens ont quitté l'Allemagne malgré leur renommée et les
offres faites par les Nazis. Ils allèrent d'abord en Suisse puis s'installèrent dans le Vermont, aux États-Unis. Il trouvait préférable de repartir de zéro dans un
pays libre que de cautionner un régime aussi infâme.
Béla Bartók (25 mars 1881, Nagyszentmiklós - 26 septembre 1945, New York) a été un pianiste de premier plan, un des compositeurs majeurs du XXe siècle, et le co-fondateur de l'ethnomusicologie, qui enregistra un grand nombre de chants populaires dans plusieurs pays. Il a été aussi un professeur renommé : on peut citer Georg Solti, György Sándor et Fritz Reiner parmi ses élèves, et il a aussi travaillé avec Sándor Végh. Il a développé un style hautement personnel, malgré de nombreuses influences et écrit toute une série de chefs-d'œuvre. Il portait un amour profond à son pays mais était largement ouvert aux autres nations et cultures, et aimait la nature et les randonnées.
Bartók avait des valeurs morales fortes et méprisait les Nazis. Il a rapidement refusé d'aller en Allemagne, d'y voir ses œuvres publiées ou jouées par des gens
favorables aux Nazis. Il a même demandé qu'elles soient incluses dans une exposition de musique "dégénérée". Il s'est aussi opposé au régime hongrois qui pactisait avec
les Nazis, et a été jusqu'à se dire juif en protestation de ce qui se passait alors. Il a écrit son 6e quatuor en 1939, chef-d'œuvre rempli de tristesse et de rage.
Après la mort de sa mère, il a pensé qu'il n'avait pas d'autre choix que de partir en exil, et est parti pour New York en 1940.
L'exil était un crève-cœur, sa santé a commencé à décliner et sa situation financière était tendue. S'il n'acceptait aucune forme de faveur ou
de charité, il était heureux d'accepter des commandes et plusieurs musiciens - dont Yehudi Menuhin lui demandèrent de
composer pour eux. Quand la 2e guerre mondiale prit fin, il était méfiant sur le type de régime que les communistes allaient mettre en place, craignant
une autre dictature, en opposition avec son idéal d'un monde sans guerre ou haine entre nations.
Son corpus inclut des chefs-d'œuvre dans le ballet (Le Mandarin merveilleux), l'opéra (Le Château de Barbe-Bleue), la musique de chambre (Quatuors,
Sonate pour violon, Sonate pour deux pianos et percussion...), pièces concertantes (concertos pour piano ou violon), musique orchestrale (Quatre Pièces,
Musique pour cordes, percussion et célesta, Divertimento, Concerto pour Orchestre), piano, et certaines de ses moins connues pièces pour chœur.
Dmitri Chostakovitch (25 septembre 1906, Sankt-Peterbourg - 9 août 1975, Moskva) a été l'un des compositeurs majeurs du XXe siècle malgré les innombrables pressions subies pendant les pires heures du régime soviétique. Il a débuté comme pianiste mais a commencé à composer en parallèle. Il y a été encouragé par Alban Berg, Bruno Walter, Toscanini... Ses premières compositions ont été de francs succès, même au début de la Grande Terreur, où il est parvenu à conserver son indépendance, jusqu'à la parution début 1936 d'un article dans la "Pravda" qui attaquait violemment sa musique et le menaçait clairement, suivi d'un autre article et d'une condamnation de l'Union des Compositeurs Soviétiques. Seuls quelques-uns - dont Prokofiev - ont osé prendre sa défense. Il a été déclaré "ennemi du peuple" ce qui présageait souvent d'une déportation, ou pire. Il a préféré alors alterner œuvres personnelles - restant secrètes -, d'autres qui semblaient dans l'esprit imposé par le régime, et beaucoup de musique de film, ce qui lui a assuré un minimum de revenus et était moins dangereux. Il a abordé le genre du quatuor à cordes, qui sera un champ d'expression personnel, moins risqué qu'opéras ou symphonies. Il a retrouvé le succès mais est resté conscient de l'épée de Damoclès au-dessus de sa tête et vivait dans une angoisse permanente.
Pendant la 2e guerre, il a rejoint une brigade de pompiers et a travaillé à la symphonie "Leningrad" lors du siège de sa ville natale, qui obtient un succès mondial puis à la 8e, l'un de ses grands chefs-d'œuvre. En 1948, il a subi une nouvelle attaque du régime, a dû faire son autocritique et perdu son poste de professeur. Il a continué à composer, mais sans faire jouer ou publier ses œuvres, dont certaines empruntent au folklore juif. L'assouplissement du régime au milieu des années 1950 a permis la création de plusieurs de ses compositions restées secrètes. Pendant les deux décennies suivantes, il a continué à composer symphonies, concertos pour David Oïstrakh ou Mstislav Rostropovitch, musique de chambre - dont de nombreux quatuors -, dont certaines sont des confessions intimes, d'autres la dénonciation de la guerre ou de la dictature (admirables 7e et 8e quatuors à cordes, sonate pour alto et piano...), alors que sa santé s'est dégradée et que le régime soviétique a alterné le chaud et le froid.
Benjamin Britten (22 novembre 1913, Lowestoft - 4 décembre 1976, Aldeburgh), un des plus importants compositeurs britanniques, était aussi un pianiste et chef d'orchestre de renom. Dans les années 1930 il a été membre actif d'un parti pacifiste. Pendant la guerre il a eu le statut d'objecteur de conscience. En 1945 il a acquis une réputation internationale avec son opéra "Peter Grimes" puis est parti en Allemagne avec Yehudi Menuhin pour jouer de la musique pour les survivants des camps de concentration. Ce qu'il a vu a eu un impact profond sur lui jusqu'à sa mort. Il a co-fondé le Festival d'Aldeburgh avec le ténor Peter Pears en 1948. Il a enseigné à son unique élève, Arthur Oldham, pendant trois ans et continué à composer - surtout des opéras - pendant les années 1950.
Il a noué des amitiés avec Dmitri Chostakovitch, le violoncelliste Mstislav Rostropovitch et le pianiste
Sviatoslav Richter. Il lui a été demandé d'écrire une œuvre pour la consécration de la nouvelle cathédrale de Coventry -
l'ancienne ayant été presque entièrement détruite par les bombardements Nazis pendant la guerre. En 1962 le "War Requiem" a été créé dans la cathédrale de Coventry et a été
aussitôt reconnu comme un chef-d'œuvre. Britten a choisi de commémorer les morts des deux guerres mondiales, dans une partition de grande envergure avec trois solistes, deux
chœurs dont un de garçons, un ensemble de chambre et un grand orchestre, sur des textes du Requiem traditionnel et des poèmes bouleversants de Wilfred Owen qui fut tué en
France à une semaine de la fin de la 1ere guerre. Il a demandé qu'il n'y ait pas d'applaudissements.
Les trois solistes devaient être russe, anglais (Pears) et allemand (Dietrich Fischer-Dieskau) en signe de réconciliation, mais les autorités soviétiques bloquèrent Galina Vishnevskaya.
Chostakovitch a dit à Rostropovitch qu'il croyait que c'était "la plus grande composition du XXe siècle". Elle fut rapidement enregistrée par Britten - avec Vishnevskaya - et
d'autres grands chefs comme Carlo Maria Giulini. Un concert a eu lieu à la cathédrale de Coventry en 2012 pour célébrer le 50e anniversaire de la
pièce et de la cathédrale sous la direction d'Andris Nelsons.
Olivier Messiaen (10 décembre 1908, Avignon - 27 avril 1992, Clichy), compositeur majeur du XXe siècle, a renouvelé la musique française par une inspiration personnelle qui a su se souvenir du passé, intégrer des influences lointaines (Grèce, Inde, Indonésie...), les chants des oiseaux dont il devint un expert et associer couleurs avec certains accords. Organiste, pianiste, il a été aussi un professeur reconnu - maître ou mentor de nombreux jeunes compositeurs, chefs d'orchestre et pianistes. Dans les années 1930, il a expérimenté dans ses improvisations à l'orgue et composé de multiples pièces. Il a été fait prisonnier de guerre et envoyé dans un stalag. Profondément catholique, il y a composé en 1941 son "Quatuor pour la fin du Temps" pour violon, clarinette, violoncelle et piano, instruments à sa disposition, et qu'il a créé avec trois autres prisonniers devant l'ensemble des détenus.
En 1964 il a composé "Et exspecto resurrectionem mortuorum", pièce d'une force phénoménale, pour commémorer les morts des deux guerres mondiales, créée l'année suivante à
Paris à la Sainte-Chapelle puis publiquement à la Cathédrale de Chartres en présence du Général de Gaulle.
Il a passé huit ans sur la composition - y compris celle du livret - et l'orchestration d'un de ses plus hauts chefs-d'œuvre, l'opéra "Saint-François d'Assise" basé sur
la vie du Saint.
Vincent van Gogh (30 mars 1853, Zundert - 29 juillet 1890, Auvers-sur-Oise) a été l'extraordinaire peintre que l'on sait, mais il a été encore plus que cela. Après avoir compris que le métier de marchand d'art n'était pas pour lui, il a été attiré par une vocation religieuse. Parti en Angleterre, il a donné des cours et commencé à prêcher en 1876, avant de retourner aux Pays-Bas. Alors qu'il s'est mis à vivre assez frugalement, il a débuté des études théologiques mais sans les réussir. Il a choisi alors de devenir "prédicateur laïc" et obtenu une mission d'évangéliste près de Mons dans la région minière du Borinage fin 1878. Il a alors vécu dans le plus grand dénuement, prêchant, apprenant aux enfants à lire et écrire et le catéchisme, visitant les malades, témoin de la pauvreté et de la détresse des mineurs et choisissant rapidement de vivre comme eux. Les mineurs ont vite été touchés par tout ce qu'il faisait pour eux et sont venus l'écouter de plus en plus nombreux, "cet homme pas comme les autres".
La situation s'est reproduite à l'identique dans ses différentes affectations dans le pays Borin. Alors qu'il était mal vu par sa hiérarchie qui trouvait son comportement incompatible avec la mission qu'ils lui avaient confiée, il a redoublé ses efforts. Lors d'une épidémie de typhus il a couru d'un malade à l'autre, donnant le peu qui lui restait. Il a voulu descendre dans une mine et y a découvert 700 mètres sous terre des conditions encore pires que ce qu'il imaginait. Il a été demander des conditions meilleures pour les mineurs. Vincent a aidé lorsqu'un coup de grisou est arrivé dans une des mines, et il a soigné un mineur que les médecins pensaient perdu, et l'a sauvé. Une grève a éclaté et Vincent a organisé des collectes pour aider. C'en était trop pour sa hiérarchie qui a décidé de se débarrasser de lui. Mais des décennies après sa mort, les habitants du Borinage ont gardé souvenir de lui et de ce qu'il a fait pour eux.
Pendant toutes ces années Vincent a dessiné, offrant souvent ses croquis aux enfants. Un pasteur en a même acheté deux, au moment où Vincent a quitté la région, et lui a conseillé de travailler son don. C'est ce qu'a fait van Gogh, au-delà de toute espérance, mais sans être jamais vraiment compris. Devenu peintre, il a rêvé d'une communauté fraternelle d'artistes à laquelle il s'efforça de donner vie une fois installé à Arles.
Albert Camus (7 novembre 1913, Mondovi - 4 janvier 1960, Villeblevin) a été écrivain, philosophe, et journaliste. Mais il a été aussi un homme d'action, comme le montrent son
engagement dans la Résistance et sa vie d'homme de théâtre. Il est né dans une famille pauvre : sa mère ne savait ni lire ni écrire ; son père a été tué au début de la 1ere guerre.
Une des rares choses qu'il a apprises sur lui - rapportée par sa mère - était que son père avait été malade à la vue de l'exécution d'un homme. Son oncle Gustave l'a aidé à
développer des intérêts et donné accès à sa bibliothèque. Tout comme son instituteur, Louis Germain, qui l'a aidé à obtenir une bourse pour continuer ses études - Camus lui dédiera
son discours lors de la remise de son Prix Nobel en remerciement de son aide.
Bon gardien de but de football, il a été atteint de tubercule et hospitalisé. Il a commencé à écrire vers 1933, encouragé par son professeur de philosophie, Jean Grenier. Il a
étudié les philosophes - les grecs anciens, ceux du début du Christianisme et les allemands - ainsi que des écrivains-philosophes comme Fiodor Dostoïevski et Franz Kafka. Il était
déjà fortement anti-fasciste et opposé au colonialisme autoritaire. En 1935 il a rejoint le parti communiste, partageant certaines valeurs avec eux. Cela lui a permis d'avoir
une première expérience au théâtre comme fondateur d'une compagnie. Mais il a peu apprécié un revirement du parti l'année suivante, a protesté et a été exclu. Avec ses amis il a
fondé une nouvelle troupe qui a monté une pièce basée sur une nouvelle d'André Malraux et il a rejoint le journal de Pascal Pia dont il est devenu rapidement le rédacteur en chef.
Il s'est installé à Paris en 1940 pour travailler avec Pia dans un autre journal. Il écrit "L'étranger", et Malraux, qui en a apprécié la lecture, en a recommandé la publication.
Le roman est sorti en 1942. Il a travaillé à plusieurs pièces de théâtre dont "Caligula" en 1944 et à "La Peste". A la même époque il a rejoint la Résistance et est devenu rédacteur
en chef à "Combat", un journal clandestin. Après la Libération il est resté à "Combat", avec la volonté de promouvoir un journalisme objectif et de haute qualité. Il a été une voix
solitaire dans le monde occidental dans la condamnation de l'utilisation de la bombe atomique. Il était devenu l'une des voix qui comptaient en France et à l'étranger, et a développé
des correspondances ou/et amitiés avec Malraux, André Gide, François Mauriac et René Char.
Il a donné des conférences dans des universités de différents pays y compris aux Amériques. Il a soutenu l'intégration européenne et s'est montré méfiant à l'égard des communistes
après leurs multiples volte-face : opposé au communisme totalitaire il s'est inquiété de l'expansionnisme soviétique - juste quelques années avant ce qui est arrivé dans plusieurs
pays d'Europe centrale à la fin des années 1940 et dans les années 1950. En 1947 "La Peste" a obtenu un grand succès et il a publié une nouvelle pièce deux ans plus tard, "Les Justes".
Il n'aimait pas et se méfiait des idéologies car elles ont tendance à oublier l'humain et il pensait que la morale doit guider hommes et politiques - il a démissionné de son poste
à l'UNESCO quand l'ONU a accepté l'Espagne, qui était encore une dictature, et écrit un essai contre la peine de mort. Attaqué par certains "intellectuels" communistes et anciens
amis, il a continué à remettre en cause ses idées, se demandant en permanence "N'ai-je pas tort ?", mais leur est finalement resté fidèle. Il a écrit un nouveau livre, "La chute",
dont le ton est bien plus pessimiste. En 1956 il est retourné en Algérie (encore française), et a défendu une solution pacifique équilibrée militant pour une Algérie pluraliste.
Mais ni les colonialistes français ni les indépendantistes algériens ne voulaient d'une solution équitable. Il a été menacé et sa voix est devenue encore plus solitaire, attaquée
par les deux camps en Algérie et par les média de gauche et de droite en France.
Mais la qualité de son œuvre - qui a été traduite dans différentes langues et a touché beaucoup de lecteurs - et son humanisme ont permis sa reconnaissance internationale.
Il a reçu le Prix Nobel de Littérature en 1957 à l'âge de 44 ans, en étant le second plus jeune récipiendaire. Après son discours il a répondu à des questions et a insisté une fois
de plus sur le fait que la justice ne peut aller de pair avec la violence.
Il a défendu le statut d'objecteur de conscience aux côtés de Jean Giono et de l'Abbé Pierre. Il a réalisé et mis en scène une adaptation des
"Possédés" de Dostoïevski, qui a rencontré le succès. Il était en train d'écrire un nouveau roman, basé sur sa jeunesse et ses années d'apprentissage, au moment de sa mort accidentelle,
qu'il avait prévu comme le premier ouvrage d'un nouveau cycle, sur l'Amour, après ses cycles sur l'Absurde et la Révolte.
Six décennies après sa disparition, son humanisme, sa recherche de la vérité et de la justice, sa lucidité, son questionnement permanent résonnent chez les personnes qui sont
atterrées par les évolutions récentes du monde et des nombreux dangers de notre époque.
L'écrivain Jean Bruller, connu sous le pseudonyme de Vercors (26 février 1902, Paris - 10 juin 1991, Paris), a aussi été un illustrateur, s'est engagé dans le Résistance et a co-fondé une maison d'édition clandestine "Les éditions de minuit". Comme Albert Camus, il a été à la fois un homme de lettres et un homme d'action. Son père a quitté la Hongrie pour la France - le pays de la liberté et de l'art. Ce sera la base d'une nouvelle publiée durant la 2e guerre. Il a commencé à travailler en 1921 comme dessinateur humoristique, rédacteur de chroniques et illustrateur de livres. Il a publié une revue et un album humoristiques. En 1930, il a illustré un livre basé sur une fable écrite par André Maurois et qui dénonçait la ségrégation.
Pacifiste, il n'en a pas moins rejoint la Résistance et a choisi le nom lié au massif du Vercors dans les Alpes. Avec Pierre de Lescure il a co-fondé "Les éditions de minuit" en
1941, qui ont d'abord publié en 1942 sa nouvelle "Le silence de la mer", un de ses plus remarquables livres, suivi de textes de Paul Éluard, François Mauriac, André Gide, Jean
Paulhan...
Après la guerre, il a refusé de participer à l'élaboration d'une liste noire d'auteurs et a été fermement opposé à l'utilisation de la torture pendant la guerre d'Algérie. Vercors
a aussi écrit des romans philosophiques comme "Les animaux dénaturés" et "Sylva", des essais comme "Ce que je crois" et ses mémoires des temps de guerre dans "La bataille du silence".
L'écrivain Roger Grenier (19 septembre 1919, Caen - 8 novembre 2017, Paris) a aussi été journaliste, conférencier, homme de radio, et a travaillé pour un célèbre éditeur. Il a rejoint la Résistance en 1942 pendant la 2e guerre mondiale. Il a gagné Paris et participé à sa Libération en 1944. Il était l'une des personnes en charge des communications, et passait d'un secteur à l'autre. Un jour il a été arrêté par les allemands avec un appareil photo, et s'est trouvé sur le point d'être fusillé quand des civils parlant allemand ont discuté avec les soldats, et il a été relâché. Il n'a jamais su qui étaient ces personnes ni ce qui avait été dit.
Il a intégré la rédaction de "Combat" dirigée par Albert Camus. Il a dit plus tard qu'il avait tout appris en travaillant là. Entre 1949 et 2015 il a écrit plusieurs ouvrages sur cette période : des romans, comme "Les Embuscades", un chef-d'œuvre, des essais, comme "Albert Camus, soleil et ombre : une biographie intellectuelle", et des nouvelles, comme dans les recueils "Brefs récits pour une longue histoire" ou "Paris ma grand'ville".
Václav Havel (5 octobre 1936, Praha - 18 décembre 2011, Hrádecek) a d'abord été connu comme dramaturge, essayiste, poète et "dissident" emprisonné à plusieurs reprises ; il conduira par la suite son pays sur le chemin de la démocratie. Adolescent, il a commencé à écrire de la poésie et souhaitait faire des études littéraires ou cinématographiques à l'université, ce qui lui a été interdit par le régime communiste, car il était issu de la grande bourgeoisie. Avec des amis il a fondé un groupe qui se réunissait pour discuter librement du régime, des auteurs interdits, comme Franz Kafka, et publiait une revue clandestine. A partir de 1955 il a publié des articles et des nouvelles dans plusieurs revues, puis a écrit des pièces de théâtre, inspirées par le théâtre de l'absurde et Kafka. Elles ont connu le succès - étant même reprises à l'étranger - et son renom n'a cessé de grandir dans les années 1960. Petit à petit sa voix s'est faite plus "dissidente", dans sa recherche de la liberté et de la démocratie.
Considéré comme dissident par le régime qui s'était durci après le Printemps de Prague, ses pièces ont été interdites et il lui a été interdit de quitter le pays. Dans les années 1970, il a rédigé un plaidoyer en faveur des droits de l'homme, le manifeste de la Charte 77, et co-fondé un comité de défense pour les personnes poursuivies injustement par le régime. Il a été alors emprisonné une première fois - il aura passé au total près de cinq ans en prison. Il y a écrit un essai qui a eu un impact au-delà des frontières tchécoslovaques. Il a écrit : "Nous avons simplement continué et fait certaines choses que nous sentions devoir faire, et qu'il nous semblait décent de faire, rien de plus ni de moins". Libéré après son emprisonnement début 1989 pour l'hommage qu'il voulait rendre à Jan Palach et suite aux événements qui se déroulaient dans les autres pays d'Europe centrale et de l'Est, il a été l'une des figures des manifestations qui ont mené à la Révolution de Velours. Porté par le peuple il a fini par accepter son élection comme Président de la République Tchécoslovaque, par intérim. Il a été réélu après les premières élections libres en 1990. Il a rencontré les dirigeants politiques des pays européens et des grandes puissances pour nouer de nouvelles relations internationales et a conduit les changements qui ont permis la démocratisation de son pays.
En 1992, Havel a démissionné étant opposé à la partition du pays entre Tchèques et Slovaques qui apparaissait devenir inéluctable. Après une courte période de retrait, il a été élu Président de la nouvelle République Tchèque et continué à fortifier la démocratie et transformer son pays en un état moderne et exemplaire. Après son départ du pouvoir, il a participé à des colloques, fait partie de fondations, défendu des causes écologiques et écrit de nouvelles œuvres. Il a critiqué le capitalisme financier, qui méprise les hommes, les pays et leur histoire. Son compatriote, le romancier Milan Kundera a dit que "la vie de Václav Havel est sa plus grande œuvre d'art".
Midnight Oil est un groupe de rock australien dont les origines remontent à 1972. Après des changements de musiciens et de nom, le groupe connaît le succès dans son pays au début des années 1980 avec son line-up classique - Peter Garrett (chant), Rob Hirst (batterie), Jim Moginie (guitare, clavier), Martin Rotsey (guitare) et Peter Gifford (basse) qui part en 1987 et est remplacé par Bones Hillman. En 1984 ils arrivent au sommet des charts australiens avec leur remarquable album "Red Sails in the Sunset" et obtiennent un succès international, qui continue à grandir avec la sortie de "Diesel and Dust" en 1985 et "Blue Sky Mining" en 1990 - et leurs concerts d'une féroce énergie.
Midnight Oil est depuis longtemps critique de certains aspects de notre monde : interventions militaires (américaines), armement atomique et énergie nucléaire, consumérisme, néo-capitalisme, injustices envers les Aborigènes, etc. Ils ont participé à des concerts pour le désarmement nucléaire et pour des causes écologiques, et fait une tournée en Australie avec deux groupes indigènes, donnant une partie de leurs royalties à des organisations aborigènes.
Johnny Clegg est né le 7 juin 1953 à Bacup, Royaume-Uni, mais a grandi surtout en Afrique du Sud. Sa famille s'est installée pendant deux ans en Zambie, où il est allé à une école multiraciale. Revenu à Johannesburg, son beau-père l'a emmené découvrir la nature les week-ends. Adolescent, Johnny a du mal à trouver sa place jusqu'à sa rencontre avec Mntonganazo Charlie Mzila, un musicien zoulou. Il a fait de grand progrès à la guitare, appris les bases de la musique, de la langue et de la danse zouloues, et joué avec son ami à une époque où cela était totalement interdit. Il a été arrêté plusieurs fois pour ne pas respecter les lois de l'apartheid qui interdisaient aux gens de différentes races d'être ensemble après le couvre-feu.
A 17 ans, il a rencontré Sipho Mchunu et ils se sont mis à jouer ensemble, mélangeant leurs influences musicales et des paroles en anglais et zoulou.
Johnny Clegg a étudié l'anthropologie sociale - un de ses professeurs était David Webster, qui fut ensuite assassiné pour sa lutte contre l'apartheid - et
a écrit plusieurs articles sur musique et danse zouloues. En 1979 avec Sipho et quatre autres musiciens il a publié un album sous le nom de Juluka, qui
a obtenu des critiques élogieuses, mais a été censuré en Afrique du Sud.
A cause des lois raciales, ils ne pouvaient jouer que dans des lieux privés, comme des universités, églises, etc., et tous les membres du groupe ont été
arrêtés plusieurs fois. Leur renommée a grandi avec les disques suivants, d'abord dans le pays puis hors de ses frontières. En 1985 Sipho a décidé de partir
et un an plus tard Johnny Clegg a formé Savuka, son second groupe multiracial, continué à mélanger musique africaine et influences européennes, et sorti
"Third World Child", succès international majeur. L'album inclut l'une de leurs meilleures et plus emblématiques chansons, "Asimbonanga" qui parle de
Nelson Mandela qui était alors en prison depuis 25 ans.
Ils ont fait des grandes tournées en Afrique du Sud et le reste du monde. En 1992, Dudu Zulu, un des musiciens et danseurs a été assassiné, ce qui a provoqué
la fin de Savuka après un ultime album. En 1997, Johnny et Sipho Mchunu ont sorti un nouveau disque de Juluka. Johnny Clegg enregistrera et tournera
ensuite sous son nom. En 1997 (d'autres sources mentionnent 1999), lors d'un concert en Allemagne il est rejoint sur scène par celui qui est devenu Président
de l'Afrique du Sud, Nelson Mandela, un moment unique qui a été capté par les caméras. Un de ses
morceaux contre la ségrégation a été choisi comme hymne de la coupe du monde de football en 2010.
En 2015, Johnny Clegg est informé qu'il est atteint d'un cancer et décide de donner une tournée d'adieu. Il enregistre un dernier disque en 2017 et s'éteint
le 16 juillet 2019 à Johannesburg.
Roger Waters est né durant la 2e guerre, son père Eric Fletcher Waters a été tué l'année suivante près d'Anzio avec les autres soldats de sa compagnie lors de l'Opération Shingle. Élevé à Cambridge, il y a rencontré deux des futurs membres de Pink Floyd et présidé un groupe de jeunes faisant campagne pour le désarmement nucléaire, puis il s'est inscrit dans une école d'architecture à Londres où il a rencontré les deux autres futurs membres du groupe. Il a commencé à jouer de la musique - guitare puis basse. En 1966 Pink Floyd naît officiellement. Deux ans après, le leader, Syd Barrett a quitté le groupe suite à un effondrement mental et a été remplacé par David Gilmour, ce qui a amené un changement dans le leadership du groupe, Waters devenant un des principaux compositeurs et le parolier principal. A partir de 1973 il fournit les thèmes qui servent de base aux différents disques. Ces concept-albums vont obtenir un succès international majeur - comme "Wish You Were Here" et "The Wall", mais Waters a pris peu à peu le contrôle du groupe entre les deux. Il a fait des allusions à la guerre dès 1968, puis fait référence à celle-ci et à la mort de son père de façon de plus en plus directe, avec en point d'orgue "The Wall" et "The Final Cut".
"Wish You Were Here" parle de succès et de prix à payer - avec des morceaux extraordinaires comme "Shine on Your Crazy Diamond" et le titre éponyme -, quelque chose que Pink Floyd a vécu de près ; "The Wall" est proche d'une autobiographie musicale. Roger Waters essaie de régler ses comptes avec plein de choses - l'école, la guerre, la mort de son père, l'isolement, la folie, le fascisme, les ex, les groupies... - et on ne peut que remercier le producteur Bob Ezrin d'avoir réussi à mener à bien le projet dans un contexte difficile. Son successeur, le sous-estimé "The Final Cut" va encore plus loin : la plupart des chansons parlent de la guerre - celles du passé, avec les deux conflits mondiaux, du futur avec l'apocalypse nucléaire qui menace, et du présent avec les guerres de l'époque (Malouines, Afghanistan, Liban, etc.). Waters semble désespéré par la désintégration des rêves de l'après-guerre, des stigmates psychologiques des soldats, de la mort des enfants... Après son départ de Pink Floyd en 1985, il se lance dans une carrière solo. En 1990 il est un des grands participants à un important événement de bienfaisance avec un concert géant à Berlin, peu après la chute du Mur.
En 1992 Roger Waters sort "Amused to Death", un album de haut niveau qui reçoit d'excellentes critiques. Le disque parle des événements récents (les manifestations
Place Tiananmen, la guerre du Golfe) et du rôle des média - particulièrement la télévision - dans notre perception des événements et de la guerre. En 2004 il sort
deux nouvelles chansons anti-guerre en ligne ("To Kill the Child" et "Leaving Beirut") liées à l'invasion de l'Irak et à ses souvenirs de jeunesse du Liban.
En 2005, il retrouve ses trois anciens compagnons pour un concert de charité du Live 8 à Londres. Il débute une tournée de "The Wall" en 2010, le dernier
concert se tenant à Paris en septembre 2013.
Roger Waters est aussi un activiste, et est membre du mouvement "Boycott, Divestment and Sanctions" en solidarité avec les Palestiniens contre l'occupation
israélienne des territoires palestiniens. Accusé par certains d'anti-sémitisme, il a répondu que "critiquer le gouvernement israélien qui bafoue le droit
international et les atteintes aux droits de l'homme n'a rien à voir avec le judaïsme ou le peuple juif".
Il a aussi pris part à des actions de bienfaisance après le tremblement de terre et le tsunami en 2004 dans l'Océan Indien, il aide une organisation qui combat la
pauvreté et la malaria, une autre qui aide les vétérans américains. Ces dernières années il a aussi élevé la voix contre les politiciens d'extrême-droite
et les populistes tape-à-l'œil aux États-Unis, en Grande-Bretagne, au Brésil, etc.
Peter Gabriel s'est intéressé très tôt à la musique et appris à jour de plusieurs instruments en plus du chant. En 1968 il a co-fondé Genesis avec
d'autres étudiants. Après quelques années sans grand succès et des changements de musiciens, leur célébrité décolle au début des années 1970. Gabriel
commence à porter des costumes, masques, casques et du maquillage fluorescent lors des concerts. "Selling England by the Pound", sorti en 1973, obtient
du succès. Mais des tensions apparaissent et après un dernier album et une ultime tournée avec Genesis, Gabriel quitte le groupe en 1975.
Il prend des leçons de piano et de musique avant de publier ses deux premiers albums solo en 1977 et 1978, produits par Bob Ezrin et Robert Fripp, qui
ont du succès. Son troisième album solo regarde dans de nouvelles directions suite à son intérêt pour la musique africaine. L'album grimpe au sommet des
charts UK en 1980 et se classe très bien ailleurs. Il comprend "Biko", une chanson inspirée par la mort de Steve Biko, un activiste anti-apartheid sud-africain,
lors de sa détention par la police en 1977.
Peter Gabriel continue d'accroître ses compétences musicales (y compris en production), utilisant un studio mobile à la maison. Il commence à composer
de la musique de films - comme pour "Birdy" d'Alan Parker. Son cinquième disque solo fait un immense carton au milieu des années 1980. Les suivants
sortent très espacés - "Up" par exemple, est sorti en 2002 dix ans après l'album studio précédent - et abordent des thèmes personnels (mariage raté,
psychothérapie, relations familiales, peurs, naissance, mort...). Au fil des années il a noué des collaborations avec de nombreux artistes populaires de premier plan.
Son intérêt pour la musique africaine - ou plus globalement les musiques du monde - a eu un impact sur l'évolution de la musique pop occidentale. Il a
co-fondé le festival et mouvement WOMAD et créé les Real World Studios et Record Label pour aider à promouvoir ces musiques.
Défenseur de la paix et des droits de l'homme, il a pris part à diverses actions et œuvres de bienfaisance - comme les concerts d'Amnesty International
dans les années 1980 et 1990, le concert du Live 8 en 2005, le concert Nelson Mandela's 46664 contre le sida... Il a aidé à fonder et financer The Elders,
une organisation d'hommes d'état âgés, œuvrant pour la paix et les droits de l'homme, avec Nelson Mandela.
Il a fondé Witness, une organisation qui forme les activistes à l'utilisation de la vidéo et d'internet pour révéler les atteintes aux droits de l'homme
dont ils sont témoins. Ces dernières années il a participé à des protestations et des actions contre ces atteintes ou des conflits en Iran, Syrie,
au Tibet, à Hong Kong, Gaza. Comme Desmond Tutu ou Roger Waters, il défend la solution à deux états.
Gino Bartali (18 juillet 1914, Ponte a Ema - 5 mai 2000, Firenze), un des plus grands champions cyclistes du XXe siècle, était aussi un homme très pieux. Il a commencé à travailler à 13 ans dans un magasin de cycles ; son patron, Oscar Casamonti, a détecté son talent et l'a aidé à acheter un vélo. Il n'a pas fallu longtemps pour que Bartali gagne des courses et devienne un des meilleurs jeunes amateurs. Il est passé professionnel en 1935, et a rapidement montré ses grandes qualités de grimpeur mais aussi de sprinteur, gagnant des étapes lors de son premier Giro d'Italia et d'autres courses en France et en Espagne. En 1936 il a gagné le Giro, mais sa saison est endeuillée par la mort accidentelle de son jeune frère en course, et il a été à deux doigts d'arrêter. Il a gagné le Giro de nouveau en 1937 ; en 1938 il s'est focalisé sur le Tour de France et a gagné la course avec 18 minutes d'avance. En 1939, il a fini second du Giro, s'est émerveillé des qualités du jeune Fausto Coppi, mais n'a pu participer au Tour en raison des tensions en Europe. En 1940 il a aidé Coppi à gagner le Giro. Après la guerre, il a gagné le Giro en 1946, fini second derrière Coppi l'année suivante, et remporté son second Tour en 1948 avec une avance de 26 minutes, 10 ans après sa première victoire. Son triomphe a joué un grand rôle dans la réconciliation des italiens qui avaient été près d'une guerre civile après la tentative d'assassinat du leader communiste. En 1949 il a fini second derrière Coppi au Giro et au Tour. Il a gagné d'autres courses et étapes dans les années qui ont suivi, se retirant début 1955. Devenu directeur sportif, il a réussi à recruter Fausto Coppi, mais celui-ci a contracté la malaria sans qu'elle soit diagnostiquée et est mort en janvier 1960. Bartali a gagné 2 Tours, 3 Giros - étant 7 fois Meilleur Grimpeur -, 4 Milano-San Remo, 3 Giros di Lombardia et 4 titres nationaux, faisant de lui, comme Coppi, un "campionissimo".
La mort de son jeune frère a transformé Bartali. D'un jeune homme frivole il est devenu profondément croyant, priant pour son frère, rejoignant l'Ordre
des Carmes déchaux séculier et l'Action catholique. Il était résolument anti-fasciste.
Il a gardé secrètes ses actions lors de la 2e guerre, rendues publiques 13 ans après sa mort, quand il a été reconnu comme Juste parmi les Nations.
Sous couvert de s'entraîner il parcourait des centaines de kilomètres pour rallier Assise
ou d'autres lieux. cachant messages et faux papiers dans le cadre de son vélo - en tant que membre d'un réseau de Résistance dirigé par l'archevêque de
Firenze et un rabbin, qui a sauvé près de 800 juifs et des Résistants. Il a aussi caché une famille juive dans sa cave et en 1943 emmené des réfugiés
juifs vers les Alpes suisses.
Nelson Rolihlahla Mandela (18 juillet 1918, Mvezo - 5 décembre 2013, Johannesburg) a été le premier de sa famille à aller à l'école - méthodiste. Il a fait des études de droit à la seule université acceptant les Noirs. Il a adhéré au Parti Communiste et adopté la doctrine de non-violence prônée par Gandhi. Il a découvert l'existence de l'ANC - qui luttait contre les discriminations raciales et réclamait le suffrage universel - qu'il a rejoint en 1943. Les élections de 1948 ont débouché sur la mise en place de l'apartheid. Au début des années 1950, Mandela, l'un des premiers avocats noirs de Johannesburg a été élu vice-président national de l'ANC et a lancé une campagne de désobéissance civile. Il a été arrêté lors d'une grande manifestation. Le pouvoir a alors durci ses lois et Mandela a été condamné à de la prison avec sursis, interdit de réunion et placé en résidence surveillée.
Ceci l'a amené à organiser l’ANC en cellules clandestines et à chercher à unir noirs, indiens, métis et blancs anti-apartheid. Il a été de nouveau arrêté fin 1956 puis acquitté lors du procès. L'ANC a vu alors la naissance du PAC issu de ses rangs les plus virulents. En 1960 à Sharpeville, la police a tiré sur la foule à la fin d'une manifestation pacifique du PAC. Suite aux manifestations qui ont suivi, le gouvernement a interdit ANC et PAC et fait arrêter leurs leaders. Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné le massacre et demandé au gouvernement sud-africain d'abandonner l'apartheid. Face à l'intransigeance du gouvernement, Mandela a lancé une grève générale et fondé une branche militaire, qui a lancé des actions de sabotage - il souhaitait éviter toute perte en vie humaine et ne pas envenimer les relations interraciales, mais a cependant envisagé des actions de guérilla si les sabotages s'avéraient insuffisants. En 1962 il a voyagé dans de nombreux pays africains pour obtenir le soutien des gouvernements et préparer la lutte armée. Ces changements lui ont aliéné plusieurs gouvernements occidentaux et les américains ont aidé à son arrestation. Il a été condamné dans un premier temps à cinq ans de prison. Un nouveau procès a lieu en 1963 pour d'autres charges et lui et d'autres leaders ont été condamnés à la perpétuité, échappant à la peine de mort, probablement parce qu'aucune action de guérilla n'avait eu lieu, et que les pressions internationales étaient fortes, l'ONU condamnant de son côté le procès et recommandant des sanctions internationales pour mettre fin au régime de l'apartheid.
Le gouvernement sud-africain a au contraire renforcé sa politique de ségrégation et procédé à de nombreuses expulsions de populations noires vers les
townships ou autres zones qui leur étaient réservées. Mandela a été envoyé dans l'île prison de Robben Island où il est resté dix-huit ans. Il y a effectué
des travaux forcés dans des conditions de détention inhumaines. Il y a mené des actions de contestation et a encouragé les prisonniers à échanger leurs
connaissances. Il a alors aussi cherché à comprendre les blancs, leur mentalité, leurs craintes... Il a appris leur histoire et leur langue.
Fin 1971, l'ONU a déclaré l'apartheid crime contre l'humanité, mais rien n'a changé. Les émeutes de Soweto ont éclaté en 1976, après que la police ait
tiré sur des enfants et des étudiants venus manifester pacifiquement, et l'un des principaux leaders du mouvement, Steve Biko est mort des sévices subis
en prison. L'ONU a demandé la libération des prisonniers politiques puis imposé un embargo sur les ventes d'armes. Le régime a mis Mandela et les autres
leaders à l'isolement. En 1982, Mandela et ses compagnons ont été transférés dans la prison de Pollsmoor, dans la banlieue du Cap. D'un côté la lutte
s'est durcie - la branche militaire de l'ANC a organisé plusieurs sabotages ou attentats avec des victimes civiles, le parti zoulou de l'Inkatha a aussi
alimenté la violence et des escadrons de la mort ont assassiné ou torturé des activistes, jusqu'en Europe -, de l'autre des contacts entre le
gouvernement et Mandela ont débuté. Il a été transféré en 1986 dans une villa où il peut recevoir librement des visites.
La situation en Afrique du Sud a encore empiré et l'état d'urgence imposé, alors que les sanctions économiques internationales pèsent sur le pays. Le Président Pieter Botha a donné quelques signes d'ouverture et a relancé les négociations avec l'ANC. Mandela l'a rencontré en 1989, pour voir comment éviter une guerre civile. Mandela a exprimé la nécessité du suffrage universel (one man, one vote) et la gestion des inquiétudes des blancs. Suite à un accident de santé Botha a été remplacé par Frederik de Klerk. Celui-ci a fait libérer plusieurs hauts responsables de l'ANC en 1989, puis a légalisé l'ANC et fait libérer Mandela en 1990, après plus de 27 ans passés en prison.
Mandela a appelé à la fin de la lutte armée et négocié une constitution transitoire avec le gouvernement. Les dernières lois de l'apartheid ont été
supprimées en 1991, et Mandela a été élu à la tête de l'ANC. Mais la situation est restée tendue et plusieurs massacres ont encore eu lieu. de Klerk
a dû organiser un référendum dans la population blanche pour qu'une nette majorité se prononce en faveur des réformes, et Mandela a à négocier aussi
avec le parti zoulou et l'extrême droite pour éviter un bain de sang et s'assurer de leur participation démocratique au scrutin. En 1993 de Klerk et
Mandela ont conjointement reçu le Prix Nobel de la Paix.
Nelson Mandela a été élu Président de l'Afrique du Sud en 1994, et il a pris la tête d'un gouvernement d'union nationale. Il a créé la Commission de
la vérité et de la réconciliation dirigée par l'archevêque Desmond Tutu, œuvré à la réconciliation nationale
par différentes actions auprès de chaque communauté, travaillé à la reconstruction économique, et à renforcer la démocratie pour le futur. En 1999 il
n'a pas, comme il l'avait prévu, chercher à être réélu.
Mandela a alors créé une fondation pour l'éducation et lutter contre le sida, apporté son soutien à d'autres organisations pour l'enfance, joué un rôle
de médiateur au Burundi, s'est opposé à l'invasion de l'Irak sans mandat de l'ONU, a critiqué le régime dictatorial au Zimbabwe, défendu la solution
à deux états en Israël et Palestine, et co-fondé le conseil des Elders avec l'aide de Peter Gabriel entre autres.
Quelques leaders politiques ont essayé d'améliorer le monde et de le rendre plus sûr. Loin d'être parfaits, ils ont choisi néanmoins le chemin vers la paix.
Les Présidents de l'ex URSS Mikhaïl Gorbatchev (né en 1931) et des USA Ronald Reagan (1911-2004) ont mis fin à la guerre froide et réduit les stocks
d'armement nucléaire.
Gorbatchev a aussi initié des réformes majeures en URSS, par le biais de la glasnost - autorisant liberté de parole et de la presse - et de la perestroïka
- pour relancer l'économie -, et a laissé les pays du Bloc soviétique faire de même et abandonner le communisme, ce qui a aussi amené la réunification allemande.
Le Président des USA Jimmy Carter (né en 1924), puis les leaders israéliens Itzhak Rabin (1922-1995), Shimon Peres (1923-2016) et le leader palestinien Yasser Arafat (1929-2004) ont œuvré pour la paix après des années de guerre et de terrorisme au Moyen-Orient et en Israël.
Quelques autres artistes populaires ont essayé d'utiliser leur célébrité pour promouvoir des actions humanitaires ou défendre l'écologie.
Bob Geldof, le leader du groupe irlandais "The Boomtown Rats", et aussi l'acteur principal du film "Pink Floyd, The Wall"
en 1982, a co-fondé le groupe "Band Aid" pour financer la lutte contre la famine en Éthiopie en 1984, et organisé les concerts "Live Aid" l'année suivante
et ceux du "Live 8" en 2005.
Il est membre d'autres organisations et fondations qui luttent contre pauvreté et maladies en Afrique et travaillent sur les problèmes majeurs du continent.
Le groupe irlandais "U2" a pris part au groupe "Band Aid" et aux concerts du "Live Aid". En 1986, ils ont participé à des actions d'Amnesty International
et au "Self Aid" pour combattre le chômage en Ireland. Ils ont été au Nicaragua, ont joué à Sarajevo et Belfast pour promouvoir la paix, ont soutenu
le Chernobyl Children's Project, etc.
Dans les années 2000 ils ont joué dans les concerts "Nelson Mandela's 46664" contre le sida et au "Live 8", et ont fait campagne avec Geldof pour demander
l'annulation de la dette du tiers-monde.
En 2020, U2 a fait don de 10 millions d'euros pour l'achat d'équipements de protection pour le personnel soignant en Irlande lors de la pandémie.
Sting, qui est devenu célèbre comme leader du groupe de rock anglais "The Police" puis pour son travail solo, qui inclut des pépites comme "Russians",
a commencé à s'intéresser aux droits de l'homme en 1981 via des concerts d'Amnesty International - dont il est alors devenu un participant régulier. Il a
rejoint le "Band Aid" et joué au "Live Aid" et vingt ans après au "Live 8".
Il a co-fondé le Rainforest Foundation Fund pour la protection des forêts tropicales humides et des peuples y vivant et pris part à des actions liées au
Chili, aux attaques du 11 septembre, au tremblement de terre et au tsunami en 2004 dans l'Océan Indien, au Tibet... Il a aussi financé des fondations luttant contre le sida ou la pauvreté.